Letter To The World, nouvel album de Lionel Martin & Sangoma Everett
Cinq ans après Revisiting Afrique, le duo Sangoma Everett & Lionel Martin est de retour avec un nouvel album, Letter To The World. Composé de huit compositions originales, plus deux reprises, cet opus est une suite personnelle et singulière, sous l’emprise du blues et rock. Trois des titres permettent de découvrir la voix de Sangoma Everett, qui asssure simultanément la batterie. Lionel Martin transcende son rôle traditionnel de saxophoniste, se muant tour à tour en bassiste et en guitariste, sans jamais perdre de vue sa vocation lyrique et spirituelle. Entretien avec Lionel Martin.
Pourquoi avoir attendu cinq ans avant d’enregistrer un nouveau disque ensemble et quel a été le déclic pour la création de celui-ci ?
L.M. : Nous étions dans l’envie tous les deux, mais enregistrer un nouveau disque c’est trouver une nouvelle histoire à raconter, un sujet, une urgence… Pour le premier disque il y avait 15 ans que j’attendais d’enregistrer avec Sangoma. Alors 5 pour le deuxième c’est presque rien !
Comment avez-vous choisi les deux reprises ?
L.M. : Depuis longtemps, depuis la première fois que j’ai entendu Sangoma chanter (en répétition ou lors des balances son avant les concerts) j’ai eu envie que tout le monde puisse avoir cette chance de l’écouter aussi. Quand il m’a appelé et dis qu’il voulait chanter Afro Blue de Mongo Santamaria et Who Knows de Jimmy Hendrix, j’ai su que l’album était prêt.
Comment c’est passé le processus de création et d’enregistrement de cet album ?
L.M. : Nous avons calé des jours de répétition en septembre puis une séance de studio en novembre. La nuit, veille de la première répétition, j’ai pensé et noté sur mon petit carnet quelques idées qui sont devenues : Ni dieu Ni maitre, A la recherche du temps futur et No Guns. Les titres sont venus après !
De son côté Sangoma a fait la même chose et m’a proposé Letter To The World, Fane & Chazelles qui au début n’étaient qu’un titre. Il m’a également présenté un texte écrit pour son voisin décédé. Il me l’a lu, je lui ai proposé un accompagnement…
Pour Irarrazabal c’est un peu plus tard qu’il a eu l’idée de reprendre ce thème d’un musicien suisse qu’il venait de rencontrer pour un concert « hommage » et de soutien à la famille d’un jeune musicien trop vite envolé.
Letter To The World est un titre de Sangoma, pour ma part j’ai eu l’idée d’Emily Dickinson pour mon attachement à la poésie, et le lien d’âme pour ce disque. Ce rapport intense à l’écriture qui semblait essentiel pour un album « lettre ».
Nous faisons confiance à l’instant présent, l’immédiateté de nos décisions. Le premier titre que nous avons travaillé était The Bottle de Gil Scott Heron, il a été décisif et générateur d’intentions mais au final nous ne l’avons pas gardé. Une idée vient, elle en donne d’autres et alors nous explorons, puis synthétisons…
Comment faites-vous pour obtenir cette cohérence entre les morceaux originaux et les reprises, et surtout entre vos styles si identifiables ?
L.M : La cohérence vient peut-être du fait de l’intention. Depuis longtemps nous parlons de faire un album de Blues. Blues dans son sens profond comme quand on parle du punk par exemple, ne pas faire référence à un style, mais à un état d’âme, une manière de ressentir, d’être et de jouer. Sangoma a joué avec les plus grandes et grands joueurs de blues de Memphis Slim bien sûr à Myriam Makeba, mais la liste est si longue…
Il aime ma façon d’être libre et mon cri. C’est un vrai soutien qu’il me donne à chaque fois dans l’encouragement d’aller plus loin tout en étant ancré dans une référence à une histoire, une tradition de jeu qui à chaque fois dépasse par sa singularité, le cadre.
Quelle est l’émotion principale (il y en de très fortes dans ce disque) que vous souhaitez transmettre à travers votre musique ?
LM : Une émotion qui traduit la beauté du monde, une forme de tristesse bien sûr mais beaucoup de cris d’espoir. C’est une lettre qui dit oui, qui veut laisser ouvertes les portes du futur